2ème partie (suite)
Grand Père ! Grand Père ! Grand Père ! Il est de retour ! Il est de retour !"
Etendu sous un arbre, Cronos somnolait toujours dans les méandres infinies de l'Inconscience quand une voix féminine le somma de revenir à la réalité des choses. Ses derniers souvenirs, il les ressassait dans son âme. Jamais, il n'oublierait. Ouranos l'avait trompé et avait attenté à la vie de sa femme et de sa descendance. La vérité se faisait lumière alors que les ombres obscurs du doute s’effaçaient lentement. Tel le soleil levant qui illumine doucement une terre aride, les ombres disparaissait. Une nouvelle journée allait commencer. Il était à Ogygie. L'Île des Rédempteurs. Dans l'Archipel des Îles des Bienheureux.
La révélation sonne comme l'arrivée de l'Ankou qui fauche la Vie des humains. Sauf que la Mort n'a pas encore voulu de lui. Bien au contraire, une nouvelle voie s'offrait à Cronos. il lutterait contre Ouranos avec les moyens qui sont à sa disposition. De vigoureuses mains se saisissaient sous ses aisselles. Des paroles réconfortantes emplies de joies, de pleurs. L'Espoir se répand autour de lui comme une goutte d'eau dans l'Océan. Mais cette goutte d'eau crée des vibrations qui se propagent dans tout cet Océan. Malheureusement, il n'est pas encore l'heure du Réveil. Hypnos lui tend de nouveau les bras et il doit se résoudre à se serrer contre lui...Une nouvelle fois...
Le Monde de l'Inconscience est un univers si vaste et encore inexploré par la Science de l'Homme. Que se cache-til vraiment tout au fond de l'Être humain ? Le maëlstrom des sentiments. Un monde anarchique car l'Homme n'est qu'anarchie. Le Bien côtoie le Mal et la limite est si mince. L'Obscur sourit à la Lumière qui, parfois, lui tend une main douce et chaleureuse. Celui qui plongerait dans cette galaxie se perdrait dans un labyrinthe éternel. Le Dédale sans début ni fin. Telle une lame affûtée qui trancherait une jolie fleur en deux, la Folie règne sur la Raison. Rare sont les gens qui en sortent vivant. Mais si un tel exploit devait se produire, alors rien ne pouvait être impossible à un Être Humain...
Lorsqu'on est face à son ennemi le plus intime, son omnipotence est telle que nos yeux restent accrochés à cette vision cauchemardesque. Dans cette mer infinie qu'est la Tromperie, il faut regarder la petite flamme de la Vérité avec justesse. Apprendre à regarder avec son coeur et non avec ses yeux. Sentir le souffle glacial de la Honte pour le métamorphoser en une brise chaude et légère symbolisant la Paix Spirituelle. Que l'on soit Homme ou Dieux, les Sentiments ne font point de différences. L'Oracle de Delphes ne pourrait prédire l'avenir de leurs victimes.
Et pourtant, à la naissance, le bébé est si pur. A l'âge adulte, il est si impur. A l'heure de sa mort, les Remords et les Regrets triomphent sur le Champ de Bataille qu'on nomme Vie. Les cadavres représentent les actes qu'on aurait aimé faire. Ils s'évaporent sous nos yeux lentement. Les survivants sont les fantômes symbolisant les Choix qu'on aurait du exécuter. Au milieu de tout ça, l'Homme contemple la lente et inexorable décrépitude de sa Vie. Et il regrette.
Il est un jour, enfin, où il doit expier ses péchés. Qu'il redevienne celui qu'il était ne l'intéresse pas plus que ça. Sa colère disparaîtra doucement comme le lit d'un fleuve qui coule dans l'Océan. Ses remords et ses regrets resteront gravés en lui mais le sourire de ceux et celles qui lui ressemblent finiront bien par faire disparaître ces sentiments d impies. Alors, sortant du cocon de la "Grande Mère Nourricière", Il sera comme le Phénix qui renaît de ses cendres. L'oiseau de feu habite le coeur de chaque être vivants sur cette terre.
Mais avant tout cela, il existe un Fantôme qui a décidé de continuer à le hanter. Les crimes qu'il a commis sont de son ressort. Mais le Tortionnaire ne semble pas vouloir se résigner à le laisser en paix. Il en veut plus. Que le Sang de Millions d'années de Colères et de Souffrances se déversent sur son enfant ne lui suffisent pas n'est point choses étonnantes. Il lui cache une vérité pourtant si évidente. Alors, fidèle à lui même, le Châtié doit faire un choix. Son avenir ou Son Père. Il ne mettra pas longtemps à réfléchir car sa décision est déjà prise. L'Autre a beau hurler: cela est décidé depuis fort longtemps. Avoir le courage de ne faire qu'un geste qui sera lourd de conséquence. Se retourner pour refuser l'existence même de ce Fantôme qui a condamné l'Ancien Roi des Dieux à vivre parmi ceux et celles qu'ils voulaient anéantir. Cruelle désillusion pour le Rédempteur qui souhaitait regagner son pouvoir à la fin fond de lui. Mais cela n'est pas plus qu'un doux rêve. Alors que le Perverti hurle, lui ordonne de ne pas se retourner, il commence lentement à pivoter sur la gauche. Le Manipulateur s'évapore de son coeur progressivement. Et quand il est de dos à Ouranos, Cronos baisse la tête et sourit.
"Que cela soit la preuve que mon âme peut être en paix. J'affronterai maintenant avec un coeur nouveau la nouvelle vie qui s'offre à moi. Le peuple qui ne me trahira jamais est maintenant avec moi. Ensemble, nous vivrons sous la bannière de l'Expiation et du Pardon. Désormais, il me faut bien l'avouer, je ne suis plus un Dieu: je suis un humain..." Murmura silencieusement Cronos.
Maintenant qu'il a affronté et gagné contre l'esprit maléfique du Maudit, un nouveau devoir, un nouveau choix, une nouvelle vie, un nouveau Destin. La lumière jaillit des cieux et baigne de sa lumière apaisante ce monde de ténèbres. Il écarte les bras, lève le son visage et se laisse illuminer par la Douceur du réveil....
Ô douce réminiscence qui fond sur le Pécheur pour qu'il comprenne une dernière fois l'étendue de la tâche qui l'attend. Le Chaos a pris place dans le coeur de l'Ancien Roi des Titans. Péché parmi les péchés, il se souvenait de cette parole prononcée à celle qu'il aimait d'un amour infini. Et pourtant, il lui avait promis une mort certaine pour une trahison qu'elle n'avait point commise. Est-ce une erreur d'aimer plus ses enfants que son mari ? Jamais un homme ne pourrait le tolérer et pourtant, c'est hélas, la cruelle vérité. La naissance d'un être cher, fruit de l'union de l'homme et de la femme, amène inexorablement l'homme à céder sa place et à ne devenir qu'un fantôme aux yeux de sa femme. Cronos l'avait-il accepté un jour ? Finalement, le fruit de sa haine envers ses enfants était né de sa tristesse de voir sa femme s'éloigner jour après jour...
Ignoble souvenir qui hante l’esprit de Cronos avant qu’il ne se réveille: pourquoi surgit il à cet instant précis ? Qu'essaye-t-il de lui montrer ? La vérité est déjà bien assez cruelle pour le Rédempteur. Les vautours s'amassent, tels des rapaces, sur le cadavre de ses regrets. Le remord atteint son apogée alors qu'il constate l'ultime soubresaut de ce coeur qui bat. Aveuglé par la haine, consumé par l'orgueil, le Titan a fait volé en éclat la dernière parcelle d'amour qui existait entre Rhéa et lui. Mais avant de vivre son péché dans la paix et l'harmonie, une dernière révélation apparut sous les traits de son jumeau. Au temps de sa puissance et de sa jeunesse. Ce sentiment de désinvolture mêlé à ce charisme impressionnant d'antan observe son homologue. Ni colère, ni haine mais une profonde déception. Cependant, teinté d'espoir. Comme il se comprenait...
" Toi qui regardais le monde d'en bas, tu oubliais de scruter les étoiles dans le ciel. Trop sûr de ton pouvoir, tu as cru que tu détenais l'ultime Vérité. Pour une arme qui n'appartenait qu'à un cycle du passé, tu as détruit ta vie. Pour un pouvoir qui ne te revenait plus, tu as anéanti mille ans de bonheur qui te tendait les bras. Parce que tu as emprunté un mauvais chemin, tu t'es perdu, ignorant la lumière qu'avait dressée Notre douce Rhéa.
Tu offres aux brebis qui te semblent égarés une parole que tu n'as jamais suivie. Ta vie n'est que chimère. Un grand pouvoir implique toujours une grande responsabilité. Toute ta vie n'est que mensonge: toi qui possédais l'ultime pouvoir, tu as rejeté ta propre faute sur un fantôme. Tu as refusé d'accepter la suite logique de la Vie: les oisillons doivent, un jour, voler de leurs propres ailes et tu les a enfermé dans une cage dorée pour un pouvoir qui ne te revenait plus. Réalise que le vrai coupable n'est point Ouranos mais bel et bien toi.
Que cette ultime offre du Destin te permette d'expier ton péché: vivre au jour le jour parmi ceux et celles qui t'aiment vraiment te fera-t-il prendre conscience de tes actes ? Que cela soit une leçon car maintenant tu viens de renaître. Ne gâche donc pas ce précieux cadeau qui t'a été offert "
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" Ca y est ! Il se réveille ! Maître Cronos est de retour parmi nous après mille ans d'attente et d'espoir ! " Criait une voix féminine.
Sur un lit, Cronos se réveilla enfin. Dieu que l'introspection fut longue et terrible. Mais ce n'est qu'à ce titre qu'une nouvelle fleur peut éclore pour naître dans un jardin paradisiaque. Tout son corps lui faisait mal: une lancinante douleur au niveau de son torse entouré d'un bandage blanc encerclait le haut de son corps. Les douleurs du corps s'apaisent mais les blessures de l'âme restent encore. Heureusement, il pouvait se lever. Certes difficilement puisque des spasmes sporadiques agitaient encore ses membres inférieurs. Les mouvements étaient présents mais saccadés. Il put se tenir assis pour contempler cet endroit inconnu pour lui. Des murs de pierres blancs sur un sol terreux mais propres. Une petite commode sur sa gauche avec des Jacinthes dans un pot. La lumière berça son visage à travers une fenêtre ouverte. Il ferma quelques instants les yeux et détourna la tête pour s'en cacher.
Des cris de joies, de soulagement se faisait entendre à l'extérieur. Même des pleurs de vieilles femmes. C'est alors qu'un vieil homme entra et lui fit face. Sur un visage creusé par les sillons de la vie, encadré par une chevelure blanche accroché en queue de cheval, il souriait en le regardant. Appuyé sur une canne en bois, ses yeux bleus se posèrent sur ceux de Cronos. Secouant la tête, il se leva difficilement et observa le vieillard.
" Cela fait depuis bien longtemps que nous vous attendions Maître Cronos. Les Générations se sont succédés sur Ogygie mais nous n'avons jamais perdu espoir. Nous savions qu'un jour où l'autre vous serez de retour. L'Âge d'Or des temps anciens est de retour. Vous avez tenu votre promesse et en ce 20 ème siècle, vous voilà de retour... Mon nom est Promethée Prisario " Dit le Vieil Homme en s'asseyant au côté de Cronos.
" Prométhée Prisario ? Ce nom évoque tellement de souvenirs pour moi. Mais pourquoi tant de bonheur pour un être qui vous a abandonné il y a très longtemps... Je m'étais endormi dans la Caverne Dorée pour ne plus en ressortir...." Rétorquait Cronos en se massant les tempes.
" Nul besoin de vous expliquer Maître Cronos. Nous sommes sur Ogygie. L'Île de l'Expiation et de la rédemption et vous avez toujours régné sur ce monde avec amour et sagesse. Certains vous voient comme un Démon, d'autres comme un Bienfaiteur. N'oubliez pas où vous êtes maintenant..." Coupa Promethée en tapotant sagement la main de Cronos.
Le Vieil homme inclina la tête une dernière fois puis quitta la chambre. Cronos se retrouva seul. L'Île de l'Expiation où il avait donné tant à une parcelle d'hommes et de femmes qui avait cru en lui d'une volonté inassouvie. Son petit jardin secret, sa terre sacrée. Ainsi, les gens attendaient-ils qu'il y règne comme au bon vieux temps ? Ainsi, il se leva et marcha péniblement jusqu'à la sortie de la petite demeure. Là, il les vit: une cinquantaine d'homme et de femmes agenouillé à terre devant le seuil de la porte retenant leur respiration devant l'apparition de l'Ancien Roi des Dieux. Des larmes avaient coulés, l'excitation de la joie faisait trembler certaines personnes. Mais c'était dans leur regard qu'il pouvait lire une joie incommensurable. C'est alors qu'il prit une décision.
" Il fut un temps où je fus emprisonné sur cette île et traité comme un prisonnier par mes siens. Vous m'avez accueilli en tant que Dieux. Même la descendance d'Héraklès n'a jamais pu soudoyer votre attachement à ma personne. Après plus de mille ans d'absences, je suis de retour parmi vous. Les temps changent, les hommes et les femmes évoluent mais l'Amour que vous me portez est intact. C'est le plus beau cadeau qu'on puisse me faire" Déclara Cronos en regardant l'assemblée.
Une nouvelle vie, un nouveau recommencement..
3ème partie
Bien du temps se sont écoulé depuis son arrivée sur Ogygie. Il est temps pour lui et sa famille d'achever ce qui avait été entrepris il y a fort longtemps. Et un ultime évènement sur la Terre allait débuter le retour de l'Ancien Roi des dieux. Advienne que pourra mais touts les pièces de ce géant jeu d'échecs sont placés. Et le roi est... Échec et mat...